12 jours sur le chemin de Saint-Jacques de Compostelle

le Chemin de Saint-Jacques de Compostelle
C'est parti pour 12 jours sur le chemin de Saint-Jacques de Compostelle en famille. Au programme Le Puy-en-Velay - Figeac

Détail du Carnet de Voyage sur le Chemin de Saint-Jacques de Compostelle

Informations sur le voyage

  • Itinéraire : 1-Le Puy-en-Velay 2-Saint-Privat d’Allier 3-Saugues 4-Le Rouget 5-Aumont-Aubrac 6-Nasbinals 7-Saint-Chély-d’Aubrac 8-Espalion 9-Massip 10-Conques 11-Noilhac 12-Decazeville 13-Felzins
  • Date et Durée du Trek : lundi 8 juillet 2019, 12 jours
  • Budget : 300€ (Food et Logement)
  • Nombre de Voyageurs : En Famille

 

 

Alors voilà. Ça s’est décidé un peu comme ça, je me suis laissée embarquer pour le chemin de Saint-Jacques de Compostelle avec ma famille.

On est parti à 4 : moi, ma cousine, ma mère et mon tonton. Je m’étais pas vraiment préparée pour ce voyage. En fait non, j’avoue, je ne m’y étais pas du tout préparée ni même intéressée. C’est mon tonton qui a tout organisé, il l’avait déjà fait une fois tout seul il y a plusieurs années alors je lui ai fait plus ou moins confiance. Moi, j’avais jamais fait de randonnée de ma vie (non la petite balade du dimanche après-midi ça compte pas !), je visualisais pas trop sur une carte où on allait exactement, ni la distance qu’on avait prévu de faire. J’ai juste suivi le mouvement sans trop me poser de question.

On a pris la voiture le dimanche 7 juillet, direction Le Puy-en-Velay en Haute-Loire. Mon tonton nous a déposées là-bas, puis il est parti seul déposer la voiture sur le parking de la Malle Postale. La Malle Postale, c’est un organisme qui s’occupe du transport de bagages, de pèlerins, et du convoyage des véhicules tout au long du chemin jusque Conques. Concrètement, ils ont un parking pour laisser toutes les voitures le temps de la marche, et des mini-bus pour ramener tout le monde ensuite. C’est super pratique quoi.

Pendant ce temps, on en profite pour acheter notre créanciale dans la petite boutique à l’intérieur de la cathédrale. La créanciale, c’est le carnet de voyage du pèlerin. On y fait tamponner chaque étape dessus, normalement un tampon par jour. Après, c’est au choix, ça peut être le tampon du gîte, de l’église du coin, de la poste … Accessoirement on y achète aussi une petite coquille, histoire de faire comme les autres.

On s’occupe aussi de prendre deux chambres de deux au séminaire Saint-Georges. Le séminaire se trouve tout proche de la cathédrale. Les chambres sont très austères, les douches communes. Pas de dortoir donc, on commence le chemin en douceur. On se met quand même dans l’ambiance avec une première lessive à la main. Comme on a pas pris beaucoup de linge, il ne faut surtout pas prendre de retard avec les lessives.

Lorsque mon tonton nous rejoint enfin, on en profite pour visiter un peu. On grimpe jusqu’à la statue de la Vierge, là-haut, un superbe point de vue sur toute la ville nous attend. Puis, on redescend pour se balader dans la ville, et pour trouver un coin sympa où manger. On se décide pour la Pizzeria L’embellie (pour prendre des forces avant le départ) : un vrai régal !

Finalement, on se pose pas très loin du Rocher en attendant 22h30 pour le spectacle son et lumières. Bon, soyons honnêtes, on a pas entendu grand chose. Mais on en a pris plein des yeux. Il y a plusieurs monuments illuminés, comme la cathédrale ou le rocher, et ça vaut vraiment le coup.

Après ça, une bonne nuit de repos avant le jour fatidique du départ.

 

Étape 1 : Le Puy-en-Velay – Saint-Privat-d’Allier

Ça y est, le jour du départ est arrivé.

On rassemble toutes les affaires, on prend un petit déjeuner qu’on aurait aimé plus consistant puis direction la cathédrale du Puy-en-Velay. Il est 7h30. Là, tous les pèlerins sont rassemblés pour la bénédiction du pèlerin. Normalement la messe commence à 7h, on est juste arrivé en retard. Au départ c’est une messe assez basique (si ce n’est un groupe de scouts qui chantent éperdument bien), puis le prêtre nous demande les nationalités de chacun. Bon, beaucoup de Français, mais aussi des Belges, des Anglais, des Américains, des Suisses … Puis, on nous remet médailles, dizainiers, et des petites prières à réciter pour les moments difficiles. On nous explique qu’on peut aussi porter une intention de prière qu’on déposera quelque part sur le chemin.

Enfin, les grilles centrales de la cathédrale s’ouvrent. C’est le grand départ pour tous.

Bien que très nombreux dans la cathédrale, les pèlerins se dispersent très vite et chacun prend son rythme. Au départ, c’est assez déroutant. Tout le monde prend la même direction, tout le monde guette après les mêmes petites bandes rouge et blanche qui indiquent le GR65. On forme une immense chaîne à la queue le-leu sur des kilomètres. On suit un sac devant, très loin. Quand on a un doute, on s’arrête, et on attend qu’un autre sac arrive, et on sait qu’on est sur la bonne voie. On reconnaît ceux qui sont partis le matin du Puy. On est pas seul.

La bénédiction du pèlerin, c’est un moment que j’ai trouvé vraiment émouvant. À mes yeux, c’est le point de départ du chemin. On commence ensemble.

La première étape, c’est d’aller jusqu’à Saint-Privat-d’Allier. Ça fait environ 25 km au total. Mon tonton s’était occupé des réservations pour les premières nuits, donc on n’avait pas de questions à se poser, juste une destination à atteindre chaque jour. Au début, on se rend pas bien compte du temps que ça peut prendre, 25 km à pieds. Dans notre tête, on devait atteindre Montbonnet à 16 km pour y faire une pause le midi. Mais en fait, pour ça, il aurait fallu partir bien plus tôt.

La route est belle, on alterne entre une route goudronnée et des sentiers assez larges de terre. Il fait très sec mais on avance bien.

Malgré la chaleur, je n’ose pas trop boire, par peur de manquer. Mais très rapidement, on tombe sur un point d’eau potable à Saint-Christophe-sur-Dolaison. C’est bien indiqué, il y a un gros robinet d’eau fraîche et des toilettes publiques. Là je vide littéralement ma gourde avant de la remplir. J’en profite, quoi !

Le reste du chemin jusque Montbonnet, je le trouve quand même assez long. C’est une route très dégagée, et avec le soleil qui tape en fin de matinée comme ça, c’est assez pénible. Je pioche même déjà dans mes abricots secs pour tenir bon. Ce qui m’a parut long surtout, c’est de voir un panneau qui nous promettait un bar à 15 minutes. J’y ai cru sur le coup. Mais clairement le propriétaire n’avait jamais fait le trajet panneau-bar à pieds. Beaucoup de pèlerins s’étaient même déjà arrêtés pour se ravitailler devant la jolie chapelle Saint Roch, juste avant l’entrée du village. Ils avaient perdu espoir apparemment.

Nous, on continue quand même, portés par le rêve d’une boisson bien fraîche. On trouve enfin le bar Le St Jacques, qui est à l’autre bout du village, derrière la butte, après une dernière montée. De mémoire, il devait être pas loin de 14h. Une pause bien méritée donc ! On remplit les gourdes, on reprend des forces, on papote. Là, je rencontre Jean-Michel. À la retraite, il fait le chemin d’une seule traite, c’est sa sortie de l’année, il adore ça. Il nous explique qu’il a perdu son chapeau au Puy, qu’il a rien réservé pour sa nuit, et qu’il est parti sans rien pour le midi. Il prend juste ce que le chemin lui propose au fur et à mesure. Sur le coup, j’avoue que je comprends pas trop sa façon de penser, mais bon, il est bien sympathique Jean-Michel.

Lorsqu’on repart, l’après-midi est déjà bien entamée, mais il ne reste plus beaucoup de route à faire.

Après Montbonnet, on est arrivé assez rapidement à Saint-Privat-d’Allier, vers la fin d’après-midi. Ce soir là c’était chez Alain et Michèle, à L’abri du Jacquet, juste à l’entrée du village. Pour le souper, on forme une grande tablée, tout le monde se rassemble autour d’un bon saucisses lentilles pour discuter de sa journée. L’ambiance est conviviale. On dévore, la salade du midi est déjà bien loin.

Là, on fait la connaissance de Yves, un prêtre de 72 ans que j’avais déjà aperçu à la chapelle avec sa sœur Cécile. Dans son sac, il a emporté son calice et sa soutane pour faire des messes régulièrement. Ce soir là, il a bénit notre repas.

Je ne le savais pas encore mais je venais déjà de faire de belles rencontres, et nos chemins n’allaient faire que se croiser jusque Conques.

 

 

Étape 2 du chemin de Saint Jacques de Compostelle : Saint-Privat-d’Allier – Saugues

Deuxième jour de marche sur le chemin de Saint Jacques de Compostelle. Au programme Saint-Privat-d’Allier Saugues. Une vingtaine de kilomètres, mais plus de dénivelé que la veille d’après les guides.

Le matin, on s’engage sur un chemin très étroit. Pas de macadam en vue, mais un sentier de terre qui serpente au milieu des herbes folles, dans une forêt. On se couvre bien, il fait encore frais et on a un peu peur des tiques.

Petite pause pour apprécier la vue depuis la jolie chapelle de Rochegude, et puis ça se corse : la pente devient de plus en plus raide, la piste tortueuse. Avec les autres randonneurs, on descend comme on peut en s’accrochant aux arbres et aux plantes. Les sacs nous déséquilibrent, et les bâtons de marche nous encombrent. Certains glissent et tombent. D’autres trottinent allègrement, mais ils sont quand même rares ceux-là. C’est à ce moment-là que je me suis fait mal aux genoux, je pense, à cause du poids du sac et des chocs répétés pour amortir ma descente. J’aurais du prendre deux bâtons pour me stabiliser et m’épargner un peu plus.

Saint-Privat-d'Allier saint jacques de compostelle

chapelle de Rochegude

En fin de matinée, on atteint Monistrol d’Allier. On y est accueilli par le pont Eiffel qui traverse l’Allier, conçu par le célèbre constructeur un an avant la Tour. On prend le temps de se poser pour prendre un café accompagné d’un morceau de brioche aux pralines roses et à la fleur d’oranger. Une tuerie. On trouve tout ce dont on a besoin dans le village : une boulangerie, des toilettes, de l’eau potable.

En sortant, on croise un homme qui gère un accueil pèlerin. Il nous parle de tout ce qu’il y a à voir dans le coin, en particulier d’une jolie chapelle troglodyte. Le temps de parler, la pluie s’était mise à tomber. Au début quelques petites gouttes, on y prête pas attention. De nature pessimiste, j’encourage quand même les autres à enfiler leur poncho. On sait jamais, ça prend quand même du temps à sortir du sac et à déballer, et ça sert plus à rien une fois qu’on est trempé.

Et là, une bonne drache comme on dit dans le Nord.

Des habitants nous proposent de manger au sec, chez eux. Mais mon tonton décline poliment l’invitation. On voulait tous avancer encore un peu. On reprend donc notre route sous la pluie. On prend deux minutes pour apprécier les orgues de basalte, des formations volcaniques sculptées par l’Allier, avant d’atteindre la fameuse chapelle Sainte-Madeleine où on décide de s’arrêter pour le midi. La pluie, c’est pénible quand même, on espérait vaguement que, le temps de manger, le beau temps reviendrait. Le coin est abrité, il y a même une table pour se poser un peu.

La chapelle est construite à même la roche, dans d’anciennes grottes habitées apparemment depuis le Néolithique, à côté de sépultures médiévales. On appelle ça des tombes sous enfeu, ça a la forme de petites niches encastrées dans la roche. À l’intérieur, deux représentantes de la “milice chrétienne” nous accueillent. Elles nous donnent à boire et nous présentent l’intérieur de la chapelle. On aurait du visiter l’église, selon elles il y avait une très belle statue à voir. Tant pis !

Dans le fond de la pièce, à peine perceptible, une petite croix est gravée à même le sol. D’après le monsieur rencontré plus tôt, elle marquerait l’endroit précis d’une faille d’où se libère une énergie à la fois cosmique et psychique. J’ai beau me mettre sur la croix, je la ressens pas cette énergie. Tant pis !

On mange, on attend, puis on se résigne à repartir sous la pluie. Les ponchos n’avaient même pas eu le temps de s’égoutter. L’après-midi promet d’être longue. On avance tous tête baissée, pour que l’eau puisse dégouliner par terre. On ne s’arrête pas, on ne se parle pas. C’est compliqué de prendre des photos, voire même simplement de lever la tête pour contempler le paysage. C’est compliqué de boire ou de grignoter, comme les sacs sont recouverts par les ponchos.

Vers la fin d’après-midi, la pluie se calme. Saugues n’est plus très loin. Le paysage change un peu et les forêts laissent place à des espèces de grandes prairies herbeuses. Des artistes se sont amusés à y faire plein de sculptures dans des troncs d’arbres. C’est assez surprenant comme accueil.

L’une de ces sculptures, c’est la bête du Gévaudan. Elle guette la ville de Saugues, en contrebas. Parce que oui, on est sur le territoire de la bête. Il y a toute une randonnée qui suit ses traces, un musée qui explique son histoire, et certains pèlerins ont même un tampon à son effigie sur leur créanciale.

Nous, on a pas eu cette chance, on dort à la Margeride. C’est pas vraiment un accueil pèlerin, mais plutôt un centre de vacances pour groupes, donc avec d’autres activités sportives. Le soir, on mange même avec tout un groupe d’enfants, un centre aéré peut-être ? Je découvre que certains font le chemin en vélo. Ils ne prennent pas les mêmes sentiers (trop escarpés) et ils font environ deux fois la distance qu’on peut faire à pieds en une journée. Du coup, ils ne croisent jamais les mêmes personnes. Quant au menu … Poulet – lentilles – pâtes.

Étape 3 sur le chemin de Saint Jacques de Compostelle : Saugues – Le Rouget

Troisième jour sur le chemin de Saint Jacques de Compostelle. Aujourd’hui, l’étape est longue mais apparemment c’est plutôt plat, donc ça ne devrait pas être trop compliqué.

Ma mère et mon oncle portent leur sac pour la première fois. Avant, comme il y avait pas mal de montées et de descentes, il avaient demandé à le faire transporter par la Malle Postale, et tous les soirs, les sacs les attendaient bien sagement au gîte. Pour amortir le poids sur les épaules, avec ma mère, on a placé nos polaires sous les bretelles de nos sacs. Ça évite les frottements, et du coup ça fait un peu moins mal aux trapèzes quand on a pas l’habitude de porter.

Et c’est parti pour plus de 30 km de forêts.

On croise çà et là les belles vaches de l’Aubrac qui flânent entre les arbres, celles qui ont les yeux fort noirs, comme si elles s’étaient maquillées avec du khôl.

Un monsieur fait le chemin avec son chien. C’est un jack russel qui s’appelle Jack et qui fait le chemin de Saint-Jacques. Il a un petit sac à dos pour transporter ses croquettes du jour et quelques friandises, et des chaussures pour ne pas se brûler les pattes sur le macadam, mais il les supporte pas. Pour eux, c’est 12km maximum par jour, avec une sieste en milieu de journée.

Nos chemins se séparent donc à La Clauze, où on découvre une curieuse tour. C’est une tour heptagonale qui appartenait à un seigneur de l’époque féodale.

Quant à nous, on décide de faire halte au Sauvage pour le midi, pour éliminer la plus grande partie du trajet le matin. C’est vrai que, sur la route, il n’y a pas grand chose d’autre, c’est vraiment isolé. À moins de se poser en forêt à l’ombre. Mais du coup, on s’est forcé à traverser l’énorme forêt de la Margeride d’une seule traite pour arriver au domaine du Sauvage bien après 14h. On a mal géré sur ce coup là.

Pour être sincère, du coup la forêt, on l’a pas appréciée à sa juste valeur, et le domaine du Sauvage non plus. Pourtant apparemment c’est vraiment un coin sympa. C’est un ancien hôpital (domerie ?) des Templiers devenu accueil pèlerin, et qui propose les produits des fermiers du coin et des producteurs locaux.

L’après-midi, encore de la forêt, toujours des conifères, du moins c’est ombragé. Le dernier point d’eau, c’est à la chapelle Saint Roch. On est passé en Lozère, ça y est.

On change un peu de paysage avec de superbes prairies fleuries. Cécile, la sœur du prêtre Yves, me tient bonne compagnie. Elle m’explique les vertus des plantes et des fleurs qu’on croise. Je retiens la gentiane, les grandes tiges jaunes qui servent à faire de l’eau de vie. Heureusement qu’elle était là, parce que cette journée était pénible. Trop long, trop tard, pas assez d’eau.

On arrive (enfin !) à la ferme de la Croix du Plô qu’on avait réservée pour la nuit. Il est passé 19h. En plus, la ferme est un peu après le village du Rouget, et chaque pas compte en fin de journée.

En arrivant, je bois environ un litre d’eau et je m’effondre dans un lit. Quel bonheur. Le fermier et sa femme nous ont préparé des pâtes, des côtes de porc (ouf, je n’en pouvais déjà plus des lentilles), de la faisselle (ça ressemble un peu à de la panna cotta) et de la couperade (comme une tarte au flan avec des abricots et des raisins secs). Bref, on se sent comme à la maison.

Ce soir là, on rencontre deux filles de Paris. Elles ont tellement d’ampoules aux pieds que le fermier est venu les chercher en voiture au Rouget. C’était les derniers mètres de trop.

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Étape 4 : Le Rouget – Aumont-Aubrac

Quatrième étape sur le chemin de Saint Jacques de Compostelle.

Aujourd’hui, une petite vingtaine de kilomètre à travers la Truyère, un paysage et un nom qui évoquent la bruyère. Globalement les montées et les pentes sont belles, avec encore quelques parcelles de forêts, mais beaucoup moins que la veille. Et le sentier de terre est parfois tellement érodé par la pluie qu’il est crevassé et difficilement praticable.

Sur le chemin, les pèlerins ont amassé des petits tas de cailloux pour marquer leur passage.

On trouve aussi pas mal d’abris et de haltes, une bonne chose car on ne traverse pas beaucoup de villages. De mémoire nous n’avons traversé que les Estrets : un regard pour l’église et son clocher, puis c’est reparti.

L’arrivée à Aumont-Aubrac se fait assez tôt, en milieu d’après-midi. Le marquage du GR est un vrai jeu de piste dans la ville, il faut chercher sur les boîtes aux lettres et le long des gouttières. Une voiture mal garée et c’est fichu.

On visite l’église Saint-Étienne, et pas très loin, en cherchant bien, on trouve enfin la “pierre mystérieuse”. C’est une pierre gravée, placée sous une pietà, et dont le motif est encore aujourd’hui énigmatique. Petite déception : elle pourrait davantage être mise en valeur parce que là, c’est un peu déconcertant de trouver ça sans explications au détour d’une ruelle.

On dîne au restaurant Les Prunières, apparemment le seul qui était ouvert ce soir là dans toute la ville. Du coup, ça a été le point de ralliement de tous les pèlerins. Tout le monde voulait goûter l’aligot et la viande d’Aubrac qui sont les spécialités du coin. Un régal !

Puis, la nuit on dort chez Romain. Romain ne propose que le gîte, pas le couvert. Très abordable, et très bien. Le matin, on a même de quoi se préparer un café et des lits au top (pas de draps en papier, quel bonheur!).

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Étape 5 du chemin de Saint Jacques de Compostelle : Aumont-Aubrac – Nasbinals

Cinquième étape sur le chemin de Saint Jacques de Compostelle.

Ce matin-là, nous laissons derrière nous mon oncle qui discute avec d’autres pèlerins chez Romain. Avec ma mère et ma cousine, on prend la route de bonne heure. Au programme, environ 26km de marche, c’est assez long donc on anticipe cette fois.

À Chaze-de-Peyre, une déviation. Apparemment le chemin est dangereux. On suit les panneaux et on quitte le GR65. Pas pour très longtemps. Assez pour se rendre compte que nous avons fait un détour, et que le chemin était en réalité praticable : mon oncle nous avait déjà rattrapées.

Énorme coup de cœur pour le plateau de l’Aubrac.

Le paysage de bruyère laisse lentement place à des pâturages fleuris bordés de murets de granit à perte de vue. On doit parfois ouvrir les lourds portails pour traverser les pâtures des jolies vaches aux yeux noirs. Des plaines, enfin ! On marche sereinement, sans regarder ses pieds, et on profite pleinement du paysage. J’apprécie ce moment privilégié avec ma famille, je pense que le coup de cœur est unanime.

À un moment, une petite portion de route de macadam. J’apprends qu’il s’agit en fait de la route du générique de l’émission C’est pas sorcier de Fred et Jamy, une émission qui a bercé toute mon enfance. La cerise sur le gâteau, quoi !

Le midi, on se pose à Finieyrols pour manger. Les autres se reposent un peu, moi je repars aussitôt. Sur la route, je croise un groupe de scouts, puis plus personne avant d’arriver à Nasbinals. C’est agréable aussi parfois, de se retrouver un peu seule. Je traverse le pont romain sur le Bès, les paysages sont fantastiques, c’est un vrai plaisir.

Puis c’est le petit village de Montgros, et enfin Nasbinals. Il doit être 15h environ.

Je me pose devant l’église pour attendre les autres. Ils arrivent au compte-goutte. Quand enfin l’équipe est au complet, direction le NADA (Nasbinals Accueil et Découverte en Aubrac). Apparemment beaucoup de pèlerins avaient confondu cet hébergement avec le gîte communal de Nasbinals.

Le NADA, c’est spartiate. Des lits, des douches, une salle commune pour se préparer à manger, rien de plus. D’ailleurs, dans les douches, l’eau chaude est très longue à arriver. Je suis la première à m’y précipiter, espérant me détendre après ma journée de marche … J’ai le temps de me laver intégralement à l’eau froide avant que l’eau chaude ne pointe le bout de son nez. Perdu !

On fait deux trois courses à l’Astro marché du coin, de quoi faire des pâtes. Le soir, on forme une grande tablée avec d’autres randonneurs qui venaient, de mémoire, de la Côte d’Azur. Ils nous donnent de la charcuterie et du fromage pour accompagner nos pâtes, on discute, on rigole et on se régale !

C’est une superbe journée qui se termine.

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Aumont-AubracAumont-Aubrac

 

Étape 6 : Nasbinals – Saint-Chély d’Aubrac

Sixième étape sur le chemin de Saint Jacques de Compostelle : Nasbinals – Saint-Chély d’Aubrac, 16km environ, peu de distance mais plus de dénivelé que la veille.

Tout le monde en parle, aujourd’hui grosse pente en prévision.

Le matin, on continue à travers plaines et pâtures en empruntant les chemins de transhumance des troupeaux (les drailles?). C’est moins fleuri que la veille mais toujours très beau.

Petite pause café et cake au citron (excellent) à Aubrac. Il fait encore frais, on se pose donc à l’Annexe de l’Hôtel d’Aubrac, ce qui nous permet de découvrir une déco intérieure superbe, un peu inspiration trappeur. J’adore.

Apparemment, le clip d’Indochine « Kimono dans l’ambulance » a été tourné en partie à Aubrac. Bon, la scène est très rapide hein, mais on reconnaît bien la place et les commerces (on voit notamment Chez Germaine).

Et c’est là, en sortant d’Aubrac, qu’on se trompe de route. Attention de bien suivre le bon GR car Aubrac est un croisement entre le GR6 et le GR65, il ne suffit pas de suivre les marquages blancs et rouges donc. Nous, on s’est faits avoir.

On marche un bon moment avant de s’en rendre compte. Plusieurs heures même, puisque c’est à l’heure de manger le midi qu’on en discute. En fait, nous ne faisions que monter à travers la forêt, or, le matin, tout le monde ne parlait que d’une descente. Autour de nous, les randonneurs se font rares, et ce chemin-là est bien moins équipé que l’autre : les arbres marqués sont très espacés les uns des autres, tout comme les toilettes et points d’eau.

Par chance, on croise un couple qui passait par là. Ils nous expliquent qu’on a quitté le GR65 et qu’on est sur un autre GR, le GR6, et que les deux chemins se croisent à nouveau plus loin. Ça nous fait juste un (gros) détour de plusieurs kilomètres, peut-être 5 ou 6. Et il y aura bien une pente. Tout ce qu’on monte, on le redescend après.

On se remet en route plein d’entrain, et bien groupé pour ne pas se perdre. La forêt est très belle, la terre est presque rouge et le sentier très large. Apparemment, c’est une ancienne voie romaine encore un peu pavée. Une jeune femme nous accompagne même sur une portion du chemin, elle fait ce petit bout de randonnée tous les jours.

Et là, quand on sort de la forêt et de cette longue et lente montée, la vue est magique. Ce ne sont que des petits monts à perte de vue, hérissés de pâtures et de bois. Rien que pour ça, le détour en valait la peine. J’ai l’impression d’être au sommet du monde !

Et du coup, là, commence la fameuse descente. Au début, la pente est douce, on zigzague sur du macadam à flan de collines. Puis le sentier devient plus petit, caillouteux et il traverse une nouvelle forêt. Là, ça devient compliqué.

La descente nous paraît à tous incroyablement longue. En plus, comme on a quitté le chemin, on a absolument aucune notion du temps ou de la distance qu’il nous reste à parcourir. Les guides ne nous sont plus d’aucun secours.

Mon oncle avance à un rythme très rapide, il part devant. Ma mère, quant à elle, n’en voit pas le bout. Je la laisse derrière avec ma cousine.

Au bout d’un moment, je vois apparaître sur ma droite Saint-Chély d’Aubrac que je contourne longtemps. Un pont à enjamber, et c’est enfin la ville. Là, je rejoins mon oncle au Café de la mairie pour une bonne glace en attendant le reste de l’équipe.

Ce soir-là, on dort chez Fanny et Jérémy. L’accueil est très sympa. Je m’interroge toutefois : chercheraient-ils à achever les pèlerins avec ces derniers escaliers (extrêmement raides) et ces lits superposés ? Croyez-moi, il faut faire preuve de souplesse pour se glisser là-haut !

On dîne au Café de la mairie. Ils font de très bonnes pizzas et possèdent une petite terrasse au calme, derrière. Là, on retrouve le prêtre Yves, sa sœur Cécile et son petit-fils Téva. Ils dorment aussi chez Fanny et Jérémy, ils ne se sont pas trompés de chemin, eux.

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Étape 7 : Saint-Chély-d’Aubrac – Espalion

Septième étape sur le chemin de Saint Jacques de Compostelle, au programme Saint-Chély d’Aubrac – Espalion, environ 24 km.

Le matin, on passe visiter l’église de Saint-Chély d’Aubrac. Avec le détour qu’on avait fait la veille, on avait pas pris le temps de le faire avant. L’église est plutôt originale, on peut monter jusqu’à une tribune et ainsi avoir une vue plongeante sur le chœur.

On traverse ensuite quelques petits villages comme Lestrade et La Rozière. Dans l’un d’eux, on trouve dans une grange des boissons chaudes et réconfortantes. C’est un donativo, c’est-à-dire que l’on donne ce que l’on veut, il y a une petite boîte, et tout est en libre-service. C’est très sympa.

Puis c’est la marche jusqu’à Saint-Côme d’Olt. Avec ma cousine, on arrive en premières au village, on rêve déjà d’une bonne limonade bien fraîche. Sauf qu’on est le dimanche 14 juillet. On arrive tout juste après midi, et absolument tout est fermé à Saint-Côme d’Olt. Je suis un peu déçue, et je pense que je ne suis pas la seule.

Comme on a nulle part où se poser, la visite du village se fait très vite. Les anciens quartiers ont beaucoup de charme, apparemment ils remontent aux XV-XVIe siècles, et le clocher de l’église en vrille est vraiment curieux. On prend le temps d’observer les chardons séchés accrochés au-dessus des portes d’entrée des maisons. Ce sont des porte-bonheur.

Et là, je ne sais pas comment on fait mais on loupe la fontaine d’eau potable. J’ai appris plus tard qu’elle devait être tout proche de l’église, sur une place, avec des grands panneaux.

Un dernier regard sur le village le long du Lot et on s’en va, sans avoir rechargé les gourdes. D’ailleurs, cette dernière vue est de loin la plus belle.

Et là commence une marche pénible. On avait regardé les guides la veille. Apparemment le chemin officiel nous fait passer par une Vierge depuis laquelle on a une vue panoramique sur Espalion, et les raccourcis pour l’éviter ne font gagner que 2km. Pour 2km, on se dit, autant rester sur le chemin ! Deuxième erreur.

Pour avoir une vue panoramique, il faut grimper. Et cette montée, en pleine après-midi, en pleine chaleur, je n’en vois pas le bout. J’ai tellement soif qu’une pèlerine me donne la moitié de sa gourde d’eau, elle s’appelle Séverine. Et puis j’ai tellement soif que je vais toquer chez des habitants pour remplir nos gourdes, à ma cousine et à moi.

Non seulement la Vierge est sur un promontoire rocheux (même volcanique), mais en plus c’est une carrière à ciel ouvert. Donc ça monte, ça descend, puis ça remonte, c’est rocailleux, bref cette après-midi est un vrai calvaire.

On arrive enfin à la fameuse Vierge de Vermus. Déception, elle est toute petite. Peut-être 2 mètres de haut. Oui la vue est belle, on voit Espalion, les monts d’Aubrac et le Lot, mais ça ne valait pas tous ces efforts. Et puis maintenant, il faut tout redescendre, et là, mes genoux me disent clairement que c’était la goutte d’eau. Au début je n’avais mal qu’au genou gauche, mais en voulant l’épargner j’ai blessé l’autre. J’avais acheté une genouillère, deux jours plus tôt, du coup j’alternais un côté, puis l’autre. Je ne dis rien, mais ce jour-là j’en pleure tellement j’ai mal aux genoux. Je boîte, j’avance tout doucement, chaque pas m’est douloureux, et je sais que plus je vais lentement, plus je mettrai de temps à arriver et plus ma souffrance sera longue.

Un monsieur nous parle d’un raccourci pour aller jusqu’à Espalion. Je l’écoute même pas. La simple idée de me perdre et de faire encore un détour, ça m’achève.

Espalion n’a jamais été aussi proche. On arrive à l’église romane de Perse. Magnifique. L’église est tellement belle que je la visite avec plaisir et que j’en oublie presque mes douleurs et ma soif. Les peintures au plafond sont superbes. Et en sortant, quel bonheur, je trouve enfin de l’eau. C’est la première fois de ma vie que je bois l’eau d’un cimetière.

Enfin, on arrive à Espalion. Quand on entre dans la ville, on longe un bon moment le Lot. C’est très beau. On voit déjà les quartiers des tanneurs et le Vieux Pont, et pour la première fois, on a le sentiment d’être dans une grande ville. On se sent observé, scruté, différent des habitants avec nos gros sacs à dos et nos vêtements qui sentent le randonneur de 7 jours.

Le soir, on dort au Fil de l’eau. C’est incroyable comment ça me paraît loin. On passe devant tout le camping et les quais avant d’y arriver.

Ce soir-là, on retrouve Séverine, ma sauveuse, et Ren, qui part les matins à l’aube parce qu’elle ne supporte pas de marcher sous la chaleur. Le gîte fonctionne avec un restaurant voisin pour le souper, une tarterie qui s’appelle Curiosithé de mémoire. C’est très bon et très copieux, avec des saveurs originales. À table, on s’interroge sur le tampon du gîte : un scaphandre. On découvre que c’est à Espalion qu’a été inventé le premier scaphandre en 1864.

Après le repas, ma famille part visiter la ville. Moi et mes genoux en compote, on reste prostrés dans mon lit.

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Étape 8 : Espalion – Massip

8ème étape sur le chemin de Saint Jacques de Compostelle.

Aujourd’hui, au programme Espalion Massip, une grosse journée de 27 km.

Je me suis plutôt bien reposée la veille au soir, et je me sens prête à en découdre. Je prends la route dopée aux antalgiques.

Rapidement, je déchante. D’après les autres, à ce rythme là, jamais on sera au gîte à temps. Alors, ils me disent de faire du stop et ils me laissent là, à la sortie d’Espalion, toute seule avec mon sac et ma genouillère. Gros coup dur pour le moral. J’ai du mal à digérer la nouvelle. C’est censé être un chemin de partage où on se serre les coudes, non ?

En plus, aujourd’hui, le tour de France passe par Espalion. Du coup, les automobilistes fuient la ville avant d’y être bloqués pour la journée. Les gens roulent comme des fous, personne ne s’arrête. Je ne perds pas espoir, j’appelle un taxi. Il me donne rendez-vous au centre-ville. Je fais demi-tour et c’est parti pour faire en sens inverse les quelques kilomètres que je venais de faire difficilement. Immense soulagement quand je monte dans sa voiture et que je me laisse conduire. Son secteur ne va pas jusque Massip, et il m’annonce directement la couleur : c’est un hameau, même pas la peine de songer à faire du stop pour s’y rendre. Il me dépose donc à Estaing, où je vais devoir chercher après la Malle Postale.

Le château, du haut de sa butte, domine le village. C’est très joli, mais je n’ai pas le temps d’apprécier davantage le paysage. Que vois-je ? Le fourgon de la Malle Postale ! Je n’hésite même pas, je vais directement voir le chauffeur et je lui demande s’il lui reste de la place pour un passager jusque Massip. Très gentil, il accepte tout de suite.

La Malle Postale fait halte à tous les gîtes pèlerins. Certains fourgons sont chargés d’y déposer les sacs chaque jour pour que les marcheurs n’aient pas à les porter. D’autres transportent les marcheurs en difficultés, ceux qui reprennent le chemin à un point précis, ou au contraire, qui repartent. Le chauffeur me dit que le gîte ne sera pas encore accessible à cette heure-là, il me propose donc de me déposer à Golinhac, environ 2km plus loin, où je pourrai me poser un peu. Ça me va.

On prend alors une route à flan de colline, on serpente, on monte sans jamais s’arrêter. Je vois des pèlerins essoufflés par l’effort, cramoisis. Pour eux, le chemin fait un tout droit à travers la forêt, c’est beaucoup plus court en distance, mais ça revient quasiment à escalader la colline. Je les plains.

Finalement, j’arrive à Golinhac vers midi. Je mange ma salade, puis je vais prendre un café dans le seul commerce du village, La Bastide d’Olt. Le personnel n’est pas très accueillant, et je me sauve assez rapidement. Là, en face de l’église, je trouve une boîte à livres. Dedans, plein de Sherlock Holmes. Je choisis Les Chiens de Baskerville, et je m’assieds sur un muret pour lire tranquillement. Puis, je décide qu’il est temps d’aller jusqu’à Massip. Me voilà à prendre le chemin à contre-sens. C’est beaucoup moins balisé que je me perds souvent. Je croise tous les pèlerins qui avancent vers Golinhac, tandis que moi je recule vers Massip. Je leur demande la direction à chaque fois. Je rencontre deux Américains qui me donnent des adresses de gîtes si je souhaite faire de plus petites étapes les prochains jours.

J’arrive finalement à l’Orée du Chemin. Ren est déjà là, elle avait pris, comme d’habitude, la route à l’aube. Je passe à peu près toute l’après-midi avachie dans un lit à lire. Une journée de pause comme ça, c’est tellement réconfortant. Ma famille arrive très tard ce jour-là. Je vois qu’ils en ont bavé. Ils ont des ampoules aux pieds et la montée finale les a achevés.

Le soir, on forme une grande tablée. Je fais la connaissance d’un couple d’Américains que j’avais vus pendant ma balade en fourgon, et d’une famille d’Irlandaises. L’ambiance est conviviale, et on se régale. Je goûte des farçous, des espèces de grosses crêpes fourrées avec des légumes, miam.

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Étape 9 : Massip – Conques

9ème étape sur le chemin de Saint Jacques de Compostelle.

Aujourd’hui, direction Conques. Plus de 20 km de marche avec une descente corsée juste avant l’arrivée.

On en avait discuté avec ma famille, et on avait choisi finalement de s’arrêter à Conques. C’est une étape importante, beaucoup de pèlerins arrêtent ou reprennent leur chemin là. Je pars donc, pleine d’entrain : c’est ma dernière journée, je suis prête à donner tout ce que j’ai.

Après Massip, on traverse Golinhac que j’avais déjà exploré la veille, puis les villages d’Espeyrac et de Sénergues. Petite pause déjeuner à Sénergues pas très loin de l’église. Il y a tout ce qu’il faut à Sénergues, des tables de pique-nique, et, proches d’une jolie tour carrée, toilettes et point d’eau.

Là, on rencontre un groupe de pèlerines. Maquillées, elles avaient même pris leur maillot de bain pour faire trempette dans le Lot. Chacun avance à son rythme sur le chemin …

En cours de journée, ma mère appelle la Malle Postale. Ce qui était prévu, c’était que mon tonton rentre à la voiture en Malle Postale depuis Figeac le douzième jour, puis revienne nous chercher, ma mère, ma cousine et moi. On voulait donc changer et la date et le lieu de ramassage. Pas de chance, tout est complet. Apparemment, il faut prévoir 2 à 3 jours à l’avance pour la Malle Postale, surtout en période estivale, surtout pour un retour depuis Conques.

Il y aura bien 12 jours de marches donc. Mais dans ma tête, je ne le réalise pas encore tout à fait. Alors la descente commence et je prends sur moi. Je marche avec Cécile, on discute, et, mine de rien, on avance bien ! D’autres pèlerins se joignent même à nous, et on forme un joyeux groupe de bavards qui descendent par forêts et macadam jusque Conques.

J’avance vite, mais j’ai mal. En fait, j’essaie plus ou moins d’expédier cette étape une bonne fois pour toute. J’essaie même de descendre en marche arrière, ça fait moins mal aux genoux, par contre, c’est le ridicule qui m’achève.

Je fais une dernière pause avant une pente exatraordinairement caillouteuse et raide et tortueuse qui va me prendre plus d’une demie heure. Cécile part devant. Alors je rencontre un homme, on discute, et ça m’a fait pousser des ailes. Il veut faire l’aller jusqu’à l’océan après Compostelle, puis le retour en marchant aussi. Ça va bien lui prendre 5 mois tout ça, du coup il a quitté son travail. Quand il rentrera, il veut continuer à marcher, et, dans l’idéal, ne plus utiliser de voiture. Au début, il faisait des étapes de près de 40 km, puis il s’est blessé, s’est reposé au Sauvage quelques jours avant de reprendre la route au même rythme que moi et ma famille.

Je suis impressionnée, et je commence à comprendre la métaphore du chemin intérieur à parcourir.

Enfin, on arrive à Conques. C’est très joli, une petite ville médiévale toute en descente jusque l’abbatiale Sainte-Foy de Conques. Il n’y a que des boutiques d’artisanat et des restaurants. Pèlerins et touristes ont inondé la ville. Je vois une femme nous pointer du doigt : “Oh regarde ! Des pèlerins !”. Quel plaisir.

Ce soir, on dort au dortoir de l’abbatiale. On se présente donc à l’accueil où on nous indique le protocole à suivre. On retire chaussures et bâtons, puis on emballe nos sacs à dos dans des grands sacs poubelles imbibés d’insecticides. Apparemment c’est contre les punaises de lit. Bref, ça pue. Et c’est vraiment des dortoirs, avec 10 lits, superposés. Dans la chambre, on retrouve Jean-Michel qu’on avait rencontré dès le premier jour. Il a un compère maintenant, qui a fait tout le chemin avec lui. Il est bien sympathique aussi. On rencontre aussi une famille. Ils viennent de terminer et repartent le lendemain matin. L’une des filles s’est fait mal au genou, elle aussi. Du coup, elle m’offre gentiment son dernier patch antidouleur.

Les douches, c’est des cabines comme à la piscine. Pour la lessive, il y a bassines ou lavabos, et plein de cordes à linge dehors. C’est le travail à la chaîne ici, une vraie usine à pèlerins.

Le soir, on mange au St Jacques. Je prends des gambas qui embaument toute la terrasse. Ma cousine est un peu malade, elle touche à peine à son plat.

Puis, direction l’abbatiale pour le concert d’orgues. C’est juste sublime. J’en ai des frissons tellement c’est beau. Ma mère décide d’écouter le concert d’en haut. Elle paie 6€ pour accéder à la galerie des vitraux de Pierre Soulages, et elle profite tranquillement de sa visite en musique. Elle revient enchantée.

Puis, on ressort, et là c’est l’illumination du tympan de Sainte-Foy de Conques. Le tympan, c’est la partie semi-circulaire au-dessus de la porte principale. Il est entièrement gravé, très bien conservé, et extrêmement célèbre. Il sert souvent à expliquer le christianisme au Moyen-Âge en histoire et en histoire de l’art. On voit tout dessus, le paradis, l’enfer, le Christ en majesté, la pesée des âmes, les trompettes du Jugement Dernier …

Enfin, de retour au dortoir vers 23h, on se prépare pour une bonne nuit de sommeil. On fait un boucan monstrueux en prenant nos brosses à dents dans les sacs plastiques, et c’est encore pire quand on monte dans les lits en hauteur. On a réveillé tout le monde, je pense.

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Étape 10 sur le chemin de Saint Jacques de Compostelle : Conques – Noilhac

10 ème étape sur le chemin de Saint Jacques de Compostelle.

Je suis réveillée dès l’aube par une odeur insupportable de citronnelle. Toute la chambre empeste, c’est pire que l’insecticide qu’on avait mis sur nos sacs la veille. C’est Jean-Michel et son compère qui se préparent pour prendre la route, dopés aux huiles essentielles.

Du coup, tout le monde se lève.

Avec ma famille, on se concerte. Ma cousine est très malade, d’autres pèlerins lui donnent même de l’huile essentielle de menthe poivrée et des médicaments pour que ça passe. Moi, je boîte encore. Mais il faut que quelqu’un aille jusqu’à Figeac pour prendre la Malle Postale et récupérer la voiture.

Mon tonton se dévoue, il part devant et reviendra nous chercher dans deux jours. Ma cousine restera un peu à Conques puis prendra la Malle Postale pour rejoindre son père. Ma mère et moi, on continuera tout doucement le chemin.

C’est décidé, le groupe se sépare. Et là, plus d’organisation, plus de réservations, et plus de guides non plus.

Avec ma mère, on suit juste le chemin balisé sans réfléchir. On entame la matinée par une bonne montée à jeun bien raide à travers la forêt. On atteint enfin la chapelle Sainte Foy, célèbre parce que tous les pèlerins sont censés y faire sonner les cloches pour indiquer leur passage. Ce que je m’empresse de faire d’ailleurs. On avance d’un bon pas, malheureusement les points de vue se font rares malgré la hauteur. On voit un petit bout de bruyère, et Conques de très loin qui disparaît déjà.

Je ne sais pas si c’est la montée qui m’achève, ou bien si je m’étais donnée à fond la veille pour arriver jusque là, quoi qu’il en soit, je traîne la patte. J’arrive bien difficilement à Noilhac, 7km après Conques. Apparemment, le chemin original a été dévié pour que les pèlerins traversent le village et puissent s’y ravitailler.

Je croise un Tchèque très dévoué qui part explorer une ferme abandonnée à la recherche d’un bâton à ma taille. Il revient avec un manche à balais en m’assurant qu’avec deux bâtons, je marcherai mieux et je me ferai moins mal aux genoux. Alors je continue le chemin, clopin-clopant, avec mon bâton de bois et mon bâton de marche acheté chez Decathlon.

Et là, un miracle, ma mère propose qu’on fasse halte. Elle a sûrement eu pitié de moi comme le Tchèque.

On se dirige vers l’épicerie du village, qui fait aussi office de café, de traiteur, et qui gère les réservations du gîte communal. Apparemment on est les premières pour la nuit.

On achète de quoi manger, le nécessaire et quelques petits plaisirs superflus comme … une bonne fouace ! C’est une brioche à la fleur d’oranger, fait maison, spécialité locale. Miam.

On se pose au gîte, et là, le bonheur. Un bon repas, du repos, du calme.

Le soir, un couple de Français nous rejoint au gîte. Ils sont branchés sport, et le pèlerinage pour eux, c’est un challenge sportif. Ils font des étapes de 30 à 40km par jour. Moi, je suis déjà contente d’avoir réussi à les tirer ces 7km, c’est peu, mais chacun son rythme sur le chemin. Je préfère l’esprit d’entraide que de compétition !

Puis, deux Suisses arrivent aussi au gîte, un père et son fils. Ils ne font pas du tout les mêmes étapes que nous, et ont traversé Conques de jour sans voir les illuminations. On discute avec eux toute la soirée autour de pâtes à la bolognaise. Je commence à saisir ce qu’est l’esprit du chemin, un retour à la simplicité, de belles rencontres. C’est tellement facile de parler aux gens, tout le monde a le même objectif et les mêmes préoccupations, peu importe son origine ou son niveau social. On avance tous ensemble, c’est magique.

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4 réflexions sur “12 jours sur le chemin de Saint-Jacques de Compostelle”

  1. OUGIER Jeanne-Antide

    Description intéressante du périple que je m’apprête à faire depuis Nasbinals en juillet prochain.
    Fin juin 2019 j’avais fait Le puy- Nasbinals.
    Merci pour votre présentation de votre périple et votre ressenti.
    Bonne continuation

  2. Très utile, c’est très agréable à lire,
    petite question quel âge a la randonneuse,
    elle est partie sans entrainement, ce qui sera mon cas,
    j’ai 61 ans..
    Alors d’une part j’ai très envie de le faire mais d’autre part, on me dit que c’est difficile,
    Que me conseillez-vous?

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