Te Araroa – Le long chemin

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Voici le récit de ma traversée de la Nouvelle-Zélande à pied par le Te Araroa Trail. De Cap Reinga (pointe Nord) à Bluff (Pointe Sud), ces 3000km s'avèreront être bien plus qu'un trek mais une manière de vivre et de construire sa vie.

Trek : Te Araroa en Nouvelle Zelande

Informations sur le voyage

  • Durée : 5 mois et 9 jours
  • Nombre de voyageurs : Solo
  • Budget par personne : environ 4000 euros €
  • Budget utilisé pour :
    • Food & drinks
  • Logement(s) recommandé(s) :
    • tente et refuge

Voici les plus beaux itinéraires de trek et de randonnée à faire en Nouvelle Zélande :

 

Le "Te Araroa", qu'est-ce que c'est ?

La traduction la plus proche de “Te Araroa” (maori) serai en français “Le long chemin”.

Derrière ce nom se cache un grand trek qui gagne un peu plus en notoriété chaque année et qui commence à se former une solide réputation dans le monde du Thru-Hiking (randonnée très longue distance).

Relativement récent puisque créé en 2011 il propose un itinéraire permettant de traverser intégralement la Nouvelle-Zélande à pied de la pointe Nord située à Cap Reinga à la pointe Sud située à Bluff. Il permet une approche très complète de la Nouvelle-Zélande puisque l’île du Nord (où ce concentre 75% de la population) permet une approche plus culturelle quand l’île du Sud offre les plus beaux paysages et l’isolement dans les montagnes.

J’ai donc réellement apprécié les deux îles pour se qu’elles avaient à m’apporter. Au nord, la découverte d’une culture qui est une des plus accueillantes qu’il m’ai été donné de voir. Au Sud les grands espaces, les paysages et la nature vierge.

J’ai entendu parler pour la première fois du TA (comme on le nomme entre randonneurs) alors que je faisais des recherches sur les très longs treks envisageables dans le monde. A l’époque j’avais principalement entendu parler des trois prestigieux grands treks situé au Etats-Unis qui composent ce que les marcheurs américains appellent la “Triple Crown” : Le Pacific Crest Trail, le Continental Divide, et l’Appalachian Trail. Peu emballé par les Etats-Unis et par la popularité de ces treks (50 départs par jour sur le PCT) je recherchais alors une solution plus intimiste et plus solitaire. Au gré de mes recherches je finis par atterrir sur le site internet du Te Araroa. Un nom qui me plaisait tout de suite. Je n’avais alors jamais pensé à la Nouvelle-Zélande et un voyage mitigé en Australie m’avait laissé un gout amer de “L’autre bout du monde”.  Voila une occasion de découvrir ce petit pays caché dans l’ombre de son voisin géant et qui a tant à offrir aux aventuriers. Les paysages me faisaient déjà saliver (génération seigneur des anneaux oblige) et après quelques recherches j’étais décidé. Après environ un an d’économie et ma demande de visa acceptée je m’envolais pour la Nouvelle-Zélande où j’atterrissais le 4 Octobre. Le surlendemain, après avoir récupéré du voyage, je me jetais dans un bus pour Kaitaia afin de rejoindre la ville la plus au Nord du pays. Puis un ultime trajet en voiture organisé par mon hôte de Kaitaia m’emmenais à Cape Reinga, point le plus septentrional de Nouvelle-Zélande. Le 7 octobre au matin,  l’aventure qui allait changer ma vie commençait.

Même avec la meilleure volonté du monde je ne pourrai bien sûr pas décrire une aventure de 5 mois au jour le jour, d’ailleurs ça n’intéresserai personne. J’opterai donc pour une description du parcours région par région en parlant principalement des temps forts (et il y en eu beaucoup).

CAP REIGA

 

Northland

Pointe Nord de la Nouvelle-Zélande, Cap Reinga, à plus de 100km du village le plus proche. Point de rencontre entre la mer de Tasman et l’océan pacifique, le Cap Reinga est un lieu sacré dans la mythologie Maori. Les âmes des défunts s’y rendraient pour quitter la Nouvelle-Zélande et sauter dans l’au-delà. Maintenant un phare se dresse sur le Cap et de nombreux touristes viennent observer le lieu. Juste le temps de prendre une photo et je m’éclipse par un petit sentier partant du chemin principal pour rejoindre la plage. A partir de là, 3000km à pied m’attendent pour rejoindre la pointe Sud de l’île du Sud, Bluff.

Pour cette première journée j’ai prévu un peu moins de 15km. Le temps de m’habituer au poids du sac et de me mettre en jambe. D’autant que je le sais, cette première semaine sera très très dure. J’ai été prévenu, plus de la moitié des abandons se font sur les deux premières semaines de ce trek et je ne compte pas en faire partie. Au programme, 4 à 5 jours de marche sur la plage (une vrai torture pour les pieds) suivi d’une semaine à traverser des forêts qui comptent parmi les plus boueuses du pays.

Au bout de 15min de marche, premier problème auquel je n’avais pas pensé. La marée haute me bloque complètement le passage sur une centaine de mètres. Les vagues se jetant sur les énormes rochers glissant ne me laisse aucune chance. Je suis contraint de passer à travers une épaisse végétation en surplomb et je me bats déjà avec le terrain sur mon deuxième kilomètre. Passé cet imprévu je trouve la plage et me dirige vers Cap Maria Van Diemen. En chemin le temps s’améliore et la vue est splendide.

northland

Nous serons 7 marcheurs au bivouac le premier soir. Dés le lendemain je pars très tôt en compagnie de deux d’entre eux à l’assaut de Ninety Miles Beach. Voici la première grosse difficulté à passer. “Ninety miles beach” ne fait pas 90 miles comme son nom l’indique mais 90km. Pour moi qui n’aime pas la plage c’est déjà bien assez. Au lever du soleil nous la voyons pour la première fois. Quelle vue !

Une fois descendu sur la plage je me rends compte de l’épreuve qui m’attend. Le défi est autant physique que mental. La marche dans le sable fait mal, je terminerai cette semaine avec une douzaine d’ampoule sur les pieds. Pour tenter de pallier au problème je marche principalement à marée basse. Le sable mouillé est plus dure et plus confortable. Malgré cette difficulté le terrain est plat et je prévois des journées de 30km. L’autre difficulté que j’avais négligé est mental. Une fois la falaise d’où je viens dans mon dos le paysage est exactement le même sur 90km. En plus de ça  je n’ai absolument aucun repère visuel me permettant de constater ma progression, ce qui est très démoralisant. Si j’aime la solitude, heureusement je ne suis pas seul sur cette plage et les discutions avec les autres marcheurs viendront briser la monotonie et rendre le moment agréable.

Malgré le vent, le soleil tape fort et la crème solaire est indispensable. Je me permet des siestes après manger ou le temps que la marée descendante me laisse assez de sable dur sur lequel marcher.

Au bout de la plage je fête les 100 premiers kilomètres parcourus en arrivant au village d’Ahipara. Je me permet un jour de repos pour ménager mes pieds et suis fier d’avoir passé cette épreuve. Même après 3000km et 5 mois plus tard lorsque l’on me demandera la section du Te Araroa que j’ai trouvé la plus difficile j’aurai toujours la même réponse: “Niteny mile beach, la première semaine”.

Suite à cette première section, le parcours consiste à passer de la côte Ouest (mer de Tasmanie) à la côte Est (Océan pacifique). En chemin, trois forêts toutes plus boueuses les une que les autres. Il est difficile de progresser avec de la boue parfois jusqu’aux genoux mais les forêts sont absolument splendides. Le chemin à suivre est certes balisé mais on ne peut pas franchement parler d’un sentier. Il m’arrive de me perdre pendant de longues minutes mais en toute honnêteté je suis surtout content d’être sorti de la plage et ces forêts sont un terrain beaucoup plus à mon gout. Je serpente entre les fougères et les gigantesques Kauris (arbres gardiens de la forêt pour les maoris).On se croirait dans Jurassic park et je m’attends presque à tomber sur un dinosaure au détour d’une fougère.

Je termine la traversée de la forêt d’Herekino complètement trempé (il a plu toute la journée) et tombe sur un refuge construit par le fermier du coin pour les marcheurs qui arriveraient jusqu’ici. Dans l’état où je me trouve ces quelques murs de taule font office de palace. Je me rince à l’eau de pluie et m’abrite enfin.

 

Les jours qui suivront ressembleront en tout point à celui là. Je finis pas déboucher sur une route où une petite épicerie propose de loger les marcheurs le temps d’une nuit. En voulant faire quelques courses à l’occasion je me rends compte que ma carte bancaire n’est pas compatible avec le système utilisé ici. C’est la première fois que j’ai ce problème et je n’ai plus d’espèce. La femme qui tient l’épicerie (une Maori) me laisse faire l’équivalent de 60 dollars de courses, accepte de me loger pour la nuit, me propose de me faire une machine car mes vêtements sont couverts de boue et me cueille même de l’Aloe Vera fraiche de son jardin pour soulager mes ampoules. En échange, elle me donne son RIB et me dit que je n’aurai qu’à lui déposer de l’argent à la banque lorsque j’arriverai dans la prochaine ville (à 3 jours de marche). Je suis stupéfait et ému par tant de confiance.

Je lui ferai bien sûr le versement une fois arrivé à Kerikeri. Je ne l’ai jamais revu mais je me suis promis que je parlerai d’elle à chaque fois que je raconte mon histoire.

Plus tard, au travers d’une forêt j’ai l’occasion de visiter un “sanctuaire” où les Kauri sont particulièrement grands et impressionnants. Endémique de l’île du Nord de la Nouvelle-Zélande ces arbres ne sont pas les plus grands mais les plus volumineux des arbres néo-zélandais. Certains d’entre eux, de part leur âge (2000 ans pour les plus vieux) et leur taille sont devenus des divinités Maoris à part entière. Une maladie les attaque depuis plusieurs décennies et des postes de lavages de chaussures sont installés à chaque entrée de forêt pour ne pas répandre la maladie.

En tout cas je suis charmé par cette verdure luxuriante. Les forêts comme les campagnes sont somptueuses.

Après l’arrivée sur la côte pacifique ce sont de nouvelles forêts qui m’attendent. Nous sommes plusieurs marcheurs sur la même section et nous nous retrouvons souvent le soir pour bivouaquer ensemble. Après avoir marché toute une journée dans les rivières de Russell Forest c’est atelier séchage pour tout le monde.

Une fois que j’en ai fini avec les forêts du Northland je retrouve la plage, coté pacifique cette fois. Le parcours suit maintenant la côte et je suis contraint de marcher parfois enfoncé dans la vase jusqu’au genoux mais le paysage est beau et même les campings ne manquent pas de cachet.

Enfin, après de nouvelles plages à longer sur la côte pacifique (mes pieds sont maintenant endurcie et je ne fais plus d’ampoules) je quitte le Northland et rentre dans la région d’Auckland.

 

Auckland Region

A l’approche d’Auckland, le parcours rentre à nouveau dans les terres sur une centaine de kilomètre avant de rejoindre à nouveau la côte. Cette section me mène au village de Puhoi en passant à travers champs et à travers plusieurs exploitations forestières.

De Puhoi je descends la rivière en kayak sur une vingtaine de kilomètres (ce qui m’évite de marcher sur l’autoroute) et je rejoins la banlieue d’Auckland à pied, à Orewa. Enfin je vois le centre ville d’Auckland.

 

Je ne surprendrai personne en disant que la région d’Auckland n’est pas la plus palpitante pour quelqu’un qui aime la nature. Si il est marrant de croiser la population urbaine avec son gros sac et ses odeurs de randonneurs sauvage, l’entrée dans Auckland m’a énormément fatigué. Rentré dans une grande ville à pied n’est pas marrant, qu’on se le dise. Aussi, si pour l’instant j’ai marché intégralement les 600 premiers kilomètres du Te Araroa je prévois de tricher pour sortir d’Auckland. Je culpabilise un moment car on se prend vite au jeu de vouloir marcher chaque kilomètre. Et si certaines sections de route était franchement ennuyeuse dans le Northland, le paysage rattrapait souvent le tout. Ici, même pas une belle vue à se mettre sous la dent. C’est décidé, j’ai fait la moitié du parcours traversant la ville d’Auckland mais je ne vois pas l’intérêt de traverser une grande ville à pied. Je sors donc d’Auckland en stop sur quelques kilomètres pour me retrouver au jardin botanique en périphérie Sud de la ville. De là, je peux rattraper mon itinéraire sans problème. Même ici je suis bien loin d’un paysage mémorable. La section séparant Auckland à Hamilton est réputé pour être l’une des plus mauvaises de tout le Te Araroa et beaucoup de monde ne se gêne pas pour la sauter. De mon côté je tiens quand même à en faire le plus possible. Depuis le jardin botanique il me faut sortir de la banlieue à pied puis marcher le long d’une route pour rejoindre la forêt d’Hunua où enfin je peux retrouver de la verdure. Sur la route, d’énormes camions se dirigeant vers la ville me frôlent à chaque passage et je m’efforce de marcher dans le bas côté pour ne pas prendre de risque. Enfin j’arrive dans les Hunua Ranges. Une partie de la forêt est fermée à mon arrivée mais je peux au moins camper dans les collines ce soir et profiter… enfin… d’un peu de verdure et d’une belle vue.

La fermeture d’une partie du parc naturel me force à un gros détour par la route. De là, le parcours jusqu’à Hamilton n’est que succession de route et de marche à travers champs.

Waikato

Au moins tout les gens que je rencontre sont enthousiastes et me proposent leur aide spontanément. Certains me proposent un logement pour la nuit quand d’autres, se demandant bien ce que je fais là à pied sur les routes de campagnes, me proposent de me prendre en stop, ce que je refuse poliment. Même si il m’arrivera de rares écart (comme à Auckland) au cours de mon aventure, pour moi les mauvais jours et les sections ennuyeuses font partis intégrante du voyage. On ne peut pas s’attendre à ce que chaque jour soit magnifique sur un voyage de 5 mois.

J’entre donc dans la région du Waikato, une région qui de prime abord ressemble beaucoup à la France.

Passé Hamilton, je m’enfonce dans la campagne au milieu des moutons. Certains couchés de soleil m’offrent des ciels fantastiques.

Après presque un mois sans réelle zone sauvage j’approche le massif de Pirongia. Il s’agit d’un volcan éteint, maintenant parc naturel, et je ne sais pas à quoi m’attendre. Des randonneurs étant passés pas là la semaine précédente m’ont annoncé y avoir passé un très mauvais moment sous une pluie intense. Ils m’ont presque déconseillé de le faire.

Finalement je gravi le volcan qui culmine à un peu plus de 900m. Au sommet un refuge me permet d’y passer la nuit. Il fait un temps magnifique et je passe un super moment. J’ai bien fait de ne pas écouter mes camarades. Alors oui je prends des bains de boue sur l’ascension (et j’en prendrai d’autres à la descente) mais la vue est splendide.

J’ai vraiment apprécié cette section. Maintenant, le pire est derrière moi (la section Auckland-Hamilton) et chaque pas me rapproche un peu plus des vrai points forts de l’ile du Nord. Petit à petit l’été arrive, les grosses pluies printanières sont elles aussi derrière moi et je continue mon petit bonhomme de chemin vers le Sud. Je traverse des champs vallonnés aux paysages agréables et avance maintenant assez vite. Je me sens en forme.

La forêt de Pureora s’étend maintenant devant moi. En arrivant au point culminant de cette magnifique forêt je me retrouve pour la première fois du trek au dessus de 1000m. De là haut je commence à avoir une bonne vue sur le massif du Tongariro qui n’est maintenant plus si loin. Je traverse la forêt en suivant une piste de VTT  assez large et plate, ce qui me permet de marcher très vite. Plusieurs ponts suspendus impressionnants permettent de traverser les vallées parfois profondes. Enfin je tombe sous le charme d’un petit refuge, très old school, où je passerai la nuit au milieu des bois.

Cette section s’appelle Timber trail en mémoire de l’exploitation forestière qui a eu lieu ici avant la création du parc et de la zone protégée. En sortant de la fôret de Pureora j’arrive à la ville de Taumarunui. Des orages sont prévus sur la région et alors que je vais m’informer au département de conservation on me fais savoir que la prochaine section est fermée car le sentier a été trop endommagé durant les pluies printanières. Au lieu de ça, mon interlocuteur m’encourage à faire une rando annexe du parc du Tongariro, le tour du Mont Ruapehu, plus haut sommet de l’île du Nord. Le parcours me prendra le même nombre de jours et de kilomètres que la section que j’étais censé faire et à priori je ne devrai pas avoir d’orage là bas. Je fais donc du stop depuis Taumarunui pour me rendre au pied des volcans et commencer cette rando.

Manawatu-Whanganui

Arrivé sur les flancs du Mont Ruapehu, le paysage change du tout au tout. Je commence par traverser de grandes étendues de pierres volcaniques puis je retrouve un peu de végétation dans les endroits n’ayant pas souffert des lahars (coulés de boues volcaniques) provoqués par le volcan. Après deux premiers jours passés dans les nuages et sous la pluie je n’ai toujours pas eu la chance d’apercevoir le sommet. Enfin, le matin du 3eme jour, je sors du refuge et il fait un temps magnifique. Le sommet est encore entouré d’une fine couche de nuage qui se dissipe vite.

Petit à petit la végétation se raréfie et bientôt je suis dans un véritable désert.

Un matin, alors que j’ai passé la nuit dans le refuge de Rangipo Hut, je me lève aux aurores pour voir le soleil se lever sur ces plaines désertes. Je suis maintenant à 1500m d’altitude et il fait très froid. Lorsque les premiers rayon frappent la roche volcanique la montagne entière devient rouge vive, on se croirait sur Mars et le spectacle qui s’offre à moi me laisse sans voix.

Au bout de quelques heures de marche, j’ai une super vue sur le volcan voisin, le mont Ngauruhoe. Ce volcan a servi de lieu de tournage au Mordor dans le seigneur des anneaux. Dur de le reconnaitre avec la neige au sommet 🙂

Une fois le tour du Ruapehu terminé je retourne quelques kilomètres plus au Nord pour rattraper le parcours du Te Araroa et me lancer sur la traversée du Tongariro. Cette randonnée est sans doute la plus connue et la plus populaire de Nouvelle-Zélande. Si la plupart des gens font cette traversée dans le sens Sud-Nord je la ferrai pour ma part dans l’autre sens puisque je traverse le pays du Nord au Sud. Je croiserai donc des milliers de randonneur journaliers tout au long du chemin. Les gens me prennent pour un fou d’être monté la haut avec mon énorme sac. Si j’ai eu de la chance ces derniers jours avec la météo les nuages refont malheureusement leur apparition ce jour là.

Je grimpe donc dans le froid et l’humidité mais j’aime ce genre d’ambiance dramatique. A l’approche du sommet les fumerolles du volcans se mêlent au brouillard.

Une fois au sommet je peux au moins voir le Red Crater et les Emerald lakes malgré les nuages. Par temps dégagé le paysage offre un panorama exceptionnel dont malheureusement je ne pourrai pas profiter.

Enfin après presque une semaine à explorer ce parc magnifique je m’éloigne en jetant un dernier coup d’œil derrière moi.

Whanganui

J’ai maintenant quelques jours de marche pour rejoindre le fleuve Whanganui, que je descendrai en canoë jusqu’à son embouchure 185km plus au Sud sur la côte Ouest.

Le fleuve Whanganui est un lieu très important de la mythologie Maori. Selon la légende, dont il existe plusieurs versions, le mont Taranaki (qui vivait alors sur le plateau central) et le mont Tongariro se seraient battus pour l’amour de Pihanga (sommet proche du Tongariro). Le mont Tongariro aurait explosé dans une énorme éruption pour montrer sa puissance, ce qui explique son sommet morcelé, et aurai remporté les débats. Le mont Taranaki, battu, aurait alors quitté l’intérieur des terres pour la côte Ouest du pays, laissant derrière lui un sillon de terre qu’il remplit de larmes et qui devint le fleuve Whanganui.

Ce fleuve est considéré comme un trésor par le peuple Maori et suite à de nombreux débats, il devint le premier cours d’eau à être reconnu comme un être vivant et une personnalité juridique par le parlement néo-zélandais.

L’agence de location ne propose que des canoë 2 places et je fais donc équipe avec un autre marcheur pour descendre le Whanganui. Nous voilà partis pour 5 jours sur l’eau, un repos bien mérité pour les jambes. Nous nous permettons en plus une nourriture un peu plus copieuse qu’à l’accoutumé puisque c’est le canoë qui porte les sacs 🙂

Le fleuve et ses berges font partie des endroits les plus isolés et les plus sauvages de l’île du Nord. Aucun bruit parasite ne viendra perturber notre descente.

Je rejoins donc la mer et continue ma route vers le Sud. Depuis la ville de Wanganui une longue section assez ennuyeuse et parfois sur des routes dangereuses mène à la ville de Palmerston North. De là je rejoins les monts Tararua et pénètre dans la région de Wellington.

Wellington Region

La chaîne des Tararua au Nord de Wellington seront un de mes plus gros coup de cœur dans cette aventure. Après une approche des montagnes par de petits sentiers forestiers je m’engouffre dans une épaisse forêt touffue et la pente se met à être vraiment raide. Ca grimpe, ça grimpe et ça grimpe encore. Je n’en vois pas le bout. A chaque fois que je crois arriver au sommet une nouvelle côte apparait et impossible de voir le paysage à travers la végétation. Je ne sais même pas à quelle hauteur je suis. Arrivé à une certaine altitude, un vent glacial me frappe soudain à travers les arbres. Ces vents viennent tout droit de l’antarctique et frappe très violemment le Sud de l’île du Nord. J’arrive enfin au sommet et ma tête émerge des buissons pour la première fois de la journée. La vue est splendide.

J’arrive au refuge Te Matawai Hut. D’autres randonneurs sont là et me disent qu’ils ont été coincé un peu plus haut par la force du vent. Ils ont dû rebrousser chemin. Par chance le vent s’est calmé le lendemain et je peux continuer mon chemin sur le sommet de Pukematawai à plus de 1400m.

Le chemin continue en longeant les crêtes. Soudain, sur une descente, la bretelle de mon sac lâche d’un coup sec et je manque de tomber. Je tente une réparation de fortune avec de la ficelle que j’avais en cas de pépin, heureusement que j’ai pensé à ça. Je suis bien embêté, sans compter que mon sac est maintenant carrément inconfortable. Je relativise en me disant que je n’ai que quelques jours à tenir avant d’arriver à Wellington. En plus le paysage est sublime et je ne déprime pas longtemps.

Le mont Crawford est le plus haut point de cette section à 1462m. Du sommet on peut même apercevoir l’île du Sud au loin et la vue me met l’eau à la bouche. Je suis de plus en plus impatient de rejoindre les Alpes du Sud.

Devant cette vue je ne voudrai jamais avoir à redescendre mais la route est encore longue. Je rejoins donc la côte et la longe jusqu’à Wellington.

Parfois de petites sections de sentier surplombe la route et la vue n’est pas si désagréable.

Arrivé à Wellington après 1600km de marche, je prends quelques jours de repos, m’achète un nouveau sac à dos puis prend le ferry pour l’île du Sud.

Nelson-Marlborough

Je descends du ferry à Picton le 30 décembre. De là, il me faut organiser un transfert en bateau pour Ship Cove, le point de départ de la traversée de l’île du Sud. La première section suit une randonnée de quelques jours assez populaire appelée “Queen Charlotte Track”. Ce tracé consiste à longer un des nombreux bras de mer qui compose la région de Marlborough Sound.

Après cette section assez tranquille (on se sentirait presque en vacances) je prépare ma traversée des montagnes. Je me rends en stop dans la ville de Nelson pour ravitailler et organiser la suite. En effet, une fois parti dans les Alpes du Sud je ne croiserai plus le moindre magasin pendant plus d’un mois. Je fais donc les courses pour plusieurs semaines et me prépare des colis de nourriture que je ferai livrer à différents points de mon parcours. Une fois tout cela organisé je retourne en stop à Pelorus Bridge, là où je m’étais arrêté.

La prochaine section comportera plus d’une semaine d’autonomie à travers la chaîne de Richmond Range. Je me retrouve coincé plusieurs jours par une rivière en crue et dois prendre mon mal à patience. Quand le niveau de l’eau baisse je peux enfin traverser à gué bien que le courant soit fort. La météo me complique la tâche mais j’aurai tout de même quelques éclaircies bien sympathique.

Sur la redescente vers le village de St Arnaud, je traverse des forêt blanchies par le lichen, ambiance féérique. Puis je prends du repos au village après cette semaine assez intense physiquement et me ressource sur les bords du lac Rotoiti.

 

Je repars de St Arnaud après deux jours. J’ai récupéré un de mes colis de ravitaillement à l’auberge de jeunesse où je séjournais et pars pour la prochaine section. Un grand ciel bleu m’accompagne et il fait même très chaud par moment, c’est maintenant l’été en Nouvelle-Zélande.

Au programme des prochains jours, deux cols à franchir pour une semaine qui restera dans ma mémoire comme l’une des plus belles sur mes 5 mois de trek. Me voilà donc parti pour le col de Travers Saddle.

Je gravis le col de Travers Saddle le matin puis me dirige ensuite vers Blue lake.

Blue Lake est connu comment étant l’eau naturelle la plus claire du monde. Il est interdit de toucher l’eau pour ne pas la contaminer mais des études ont montré une visibilité de plus de 70m dans le lac.

L’eau de Blue Lake provient d’un autre lac en amont, le Lake Constance.  Ce dernier offre un panorama exceptionnel.

Je franchis ensuite le col de Waiau pass (1870m), un mur de plusieurs centaines de mètres de haut, pour redescendre dans la vallée et suivre le cours de la rivière Waiau à travers des plaines d’herbes dorées battus par le vent.

Je passe la nuit à Anne Hut (photo ci-dessous) puis me dirige vers Boyle Village où mon second colis de ravitaillement m’attend.

Boyle Village est en fait un centre éducatif où les écoles de l’île du Sud envoient les enfants en classe verte. Je récupère mon colis et continue mon chemin en pénétrant dans la région du Canterbury.

Canterbury

La première section de la région du Canterbury consiste à se rendre à Arthur’s Pass par la Harper pass track. Je serpente longuement dans les vallées en suivant les cours d’eau.

A Arthur’s Pass je tombe malade et me repose quelques jours à une auberge de jeunesse. Malgré mon affaiblissement je décide de faire la rando journalière d’Avalanche Peak qui part de la route et qui monte sur la crète 1100m au dessus. Sans le sac de 20kg j’ai l’impression de voler. La vue d’en haut est impressionnante.

Canterbury

Après 2 jours je repars en direction de Lake Coleridge. Très vite je me rend compte que je ne suis pas tout à fait remis. Je décide donc de faire de toutes petites journées. Je prends même un nouveau jour de repos seul à Hamilton Hut. J’apprendrai plus tard qu’un cyclone a frappé la Nouvelle-Zélande à ce moment là et que les marcheurs au Nord d’Arthur’s Pass on eu très peur. Certains m’ont raconté avoir vu des arbres tomber autour d’eux. La géographie particulière des lieux a stoppé les vents cycloniques avant la zone où je me trouve (quelques dizaines de kilomètres plus au Sud) et je n’ai pour ma part que de fortes pluies. Voilà pourquoi je n’ai pas croisé la moindre personne depuis plusieurs jours en tout cas. Je repars à nouveau et arrive à Lake Coleridge. En me réveillant le matin au bord du lac, quelque chose ne va pas. Il m’est impossible de plier le genou droit. J’ai très peur d’avoir une tendinite. Décidément ça ne va pas fort en ce moment. De toute façon, le parcours à cet endroit se stop net devant un fleuve infranchissable à pied, le Rakaia, et reprend de l’autre côté. Les notes officielles du Te Araroa proposent de faire le tour du fleuve en stop (le premier pont est à plusieurs dizaines de km). Je tente de marcher un petit peu le long de la route et trouve finalement une voiture qui m’amènera au village de Methven. Ici je décide de rester jusqu’à ce que je n’ai plus la moindre douleur au genou. J’en profite pour reprendre des forces et organiser mon transfert pour le départ du sentier de l’autre côté du fleuve. Au bout de 5 jours je suis totalement rétabli et c’est le bus de ramassage scolaire qui m’emmènera là où le sentier reprend.

Je trouve un col bien sympathique où camper pour fêter mes 4 mois de marche, déjà !!!

Pendant 3 jours je traverse une zone assez désertique. J’adore ces paysages, on se croirait dans un bon vieux western. Je ne croise absolument personne sur cette section et l’impression d’être seul au monde ne me déplait pas.

J’arrive ensuite à lake clearwater, un village de maisons de vacances qui se vide totalement en basse saison. Encore une fois, mon parcours s’arrête devant un fleuve, le Rangitata, et je dois faire du stop sur presque 100km pour passer de l’autre côté. Je n’ai pas trop de mal à faire du stop malgré l’isolement car bon nombre de touristes viennent observer la vallée et le mont Sunday qui a servi de lieu de tournage pour le seigneur des anneaux (Edoras).

Après avoir ravitaillé et être passé de l’autre côté du Rangitata, me voilà reparti pour la section qui me mènera au point le plus élevé du Te Araroa. Le parcours débute en suivant le lit d’une rivière pendant des kilomètres.

Ensuite je quitte enfin le lit de la rivière pour gravir un premier col où je décide de camper.

 

Le lendemain je monte sur des plateaux de plus en plus élevés et me permet une petite sieste à Royal Hut en début d’après-midi.

Je continue mon ascension et arrive enfin au col de Stag Saddle, plus haut point du Te Araroa, à près de 2000m d’altitude.

Je grimpe sur la crête et la suis sur plusieurs kilomètres. La vue est splendide. Devant moi le lac Tekapo d’un bleu incroyable s’étend à perte de vue alors que j’aperçois sur ma droite les hauts sommets du parc national du Mont Cook.

J’arrive au village du lac Tekapo le lendemain et en profite pour une journée de repos bien méritée.

Je continue ensuite mon chemin en direction de Twizel. En route je passe devant le lac Pukaki et le mont Cook, la vue est à couper le souffle.

Après Twizel, je prends la direction du lac Ohau. Encore un lac bleu turquoise magnifique. De quoi terminer la région du Canterbury en beauté.

Je m’enfonce dans les montagnes et quitte donc le Canterbury pour rejoindre la province d’Otago.

Otago

Je quitte donc le lac Ohau pour me rendre dans la vallée de la rivière Ahuriri (2eme photo). Il s’agit du plus gros cours d’eau que j’aurai à traverser à gué. Heureusement il n’a pas plu depuis plusieurs jours et je traverse sans problème.

Je m’engage ensuite sur une section appelée Breast Hill Track. La première partie passe à travers champs, puis je quitte le sentier principal en direction du col de Martha Saddle. Je m’arrête à Top Timaru Hut. L’île du Sud est alors à nouveau frappée d’un cyclone. Nous sommes loin des côtes et nous n’avons pas à craindre le vent mais nous serons tout de même fortement impactés.  Alors que je n’ai eu que du temps grisâtre lorsque je me trouvais sur le col, un marcheur passé quelques heures après moi se retrouve au même endroit dans 30cm de neige. Nous sommes en plein été. Après le refuge où je me trouve le parcours consiste à suivre la rivière Timaru en la traversant une douzaine de fois. A cause des intempéries apportées par le cyclone le niveau d’eau a plus que doublé et impossible de passer à gué sans danger. Nous sommes 5 marcheurs coincés dans le minuscule refuge. L’ambiance est sympa, nous approchons de la fin de l’aventure et nous nous racontons avec nostalgie les histoires vécues en route. Le matin du second jour, après une nuit glaciale, je sors du refuge pour voir l’état des lieux et même ici dans la vallée je me retrouve sous la neige.

Mais nous sommes en été et la neige fond vite. J’attends tout de même encore car en fondant elle ne fait que gonfler le niveau de l’eau. Au bout du 4eme jour je me décide, je tenterai ma chance le lendemain. Je marche quelques kilomètres puis me retrouve enfin devant cette rivière à traverser. L’eau est trouble et le courant fort, j’hésite un moment. Il y a quelques mois j’aurai rebrousser chemin mais tout au long de mon parcours j’ai pu accroitre mes connaissances et ma technique de passage à gué (notamment grâce à d’autres randonneurs plus expérimentés). Néanmoins je dois traverser cette rivière à 12 reprises et rien ne me dit qu’un franchissement en aval ne me bloquera pas la route plus loin. Je décide d’y aller. A chaque traversée je sonde consciencieusement la rivière à l’aide de mon bâton. Il m’arrive d’avoir de l’eau jusqu’à la taille et le courant fais parfois glisser mes pieds sur le fond instable de la rivière. J’arrive toutefois à passer. Je me dirige ensuite vers les hauteurs et une montée très raide m’emmène sur la crête de Breast Hill. Tout les sommets environnants sont couverts de neige, la vue est vraiment chouette. Une fois en haut j’ai moi aussi les pieds dans la neige pendant une dizaine de kilomètres.

Le sommet de Breast Hill m’offre une vue incroyable sur le lac Hawea. En face de moi s’étend le Mont Aspiring national Park.

 

Un refuge se trouve à proximité du sommet, mais je n’ai pas marché les quatre derniers jours et suis en pleine forme. Malgré une journée déjà bien chargée je décide donc de descendre dans la foulée pour le village du lac Hawea à un peu plus de 10km. La descente est très raide et technique mais j’arrive sans problème au village en fin de journée. J’ai marché 11h avec une seule pose de 30min à midi. Je suis affamé en m’arrêtant à l’auberge/camping de lac Hawea. Ce soir c’est pizza, je l’ai bien mérité.

Le lendemain, journée tranquille. 25km de plat jusqu’au lac Wanaka où j’arrive vers 13h. J’en profite pour me reposer un peu.

Je longe ensuite le lac pour m’enfoncer à nouveau dans les montagnes sur la section de Motatapu Alpine track. Le relief ici est très particulier. Les montagnes ressemblent presque à du papier froissé.

J’arrive à Arrowtown quelques jours plus tard, puis une journée sans trop d’intérêt le long de la route me conduit à Queenstown. A Queenstown je dois rejoindre l’autre bout du lac Wakatipu pour récupérer le sentier. Me voilà donc sur la pointe isolé du lac où je m’offre un nouveau jour de repos avant de débuter la dernière région du Te Araroa, le Southland.

 

 

Southland

La traversée du Southland débute par le Mavora lake walkway. Les paysages ici sont totalement sauvages et nous sommes à des dizaines de kilomètres de la première route.

Au bout de quelques jours de marche, j’atteins une piste de 4×4 au niveau de Careys Hut. A partir de là le paysage verdis et je longe les deux lacs qui forment les Mavora Lakes.

Le parcours longe ensuite la rivière Mararoa pendant deux jours sur un terrain inégal. Au début dans une forêt agréable, le sentier se perd ensuite dans les buissons épineux que j’ai toutes les peines du monde à traverser. On sent que personne ne vient par là car la signalisation est cachée par la végétation et très vite il n’est plus possible de suivre la moindre trace au sol. Je perds beaucoup de temps à chercher mon chemin. J’arrive enfin sur une route de terre qui débouche sur la state highway 94. Je n’ai plus de provisions et j’en profite pour faire du stop jusqu’à Te Anau pour ravitailler. Après avoir pris un jour de repos je refais du stop jusqu’à l’endroit où je m’étais arrêté et reprends ma route. Je traverse la forêt très dense de Takitimu où j’ai l’impression de découvrir une nouvelle espèce de fougère à chaque pas. Le parcours quitte parfois la forêt pour déboucher dans des clairières aux sol très humide, genre tourbière.

Petit à petit je quitte la forêt pour des terres agricoles et le paysage change.

Southland

Je traverse quelques unes des plus grosses ferme du pays. Ici l’industrie laitière impacte directement le paysage. Les pâturages remplacent le tussock jaunes et dures typique de l’île du Sud.

Depuis quelques jours, nous sommes un petit groupe de marcheurs à nous retrouver tout les soirs. Nous sentons la fin de l’aventure arriver et nous nous soutenons moralement car personne n’a envie d’en finir. Je traverse maintenant la dernière forêt du Te Araroa, Longwood Forest, et depuis le sommet de Bald Hill (800m d’altitude) j’aperçois l’océan pour la première fois depuis plusieurs mois.

J’atteins la plage à Colac Bay. De là je rejoins la ville de Riverton puis continue à longer la plage sur plus de 20km. Nous sommes un groupe de 7 marcheurs à nous retrouver le soir depuis plusieurs jours (nous ne marchons pas au même rythme). A partir de là nous décidons cependant de faire la route ensemble. Le temps passe ainsi plus vite sur la longue plage d’Oreti et maintenant nous nous efforçons d’apprécier chacun des derniers kilomètres à parcourir.

Le dernier jour n’est pas très marrant, le seul moyen de rejoindre Bluff est de marcher le long de la route. Qu’importe, l’aventure était incroyable ! J’arrive à Bluff dans l’après midi après un peu plus de 40km. Je savoure la traversée de cette petite pointe de Terre perdue au milieu de la mer et me dirige vers Stirling Point, la fin officielle du Te Araroa.

En allant boire une bonne bière pour fêter mon accomplissement au restaurant le plus proche, j’apprends qu’une médaille est décernée aux marcheurs ayant parcouru les deux îles. Me voilà donc médaillé. Je profite du couché de soleil en me demandant bien de quoi demain sera fait.

Je ne me remettrai jamais des 5 mois que je venais de passer. Et je ne voudrai surtout pas m’en remettre. Une chose est sûre, je serai désormais incapable de reprendre ma vie là où je l’avais laissé. Rien ne sera jamais plus comme avant. Pendant 5 mois mes seules préoccupations ont été de trouver à boire, à manger et un endroit où planter ma tente. Pendant 5 mois, marcher est devenu mon mode de vie. Je dormais maintenant mieux à même le sol que sur un matelas et j’étais persuadé de la nature de l’homme. Dans le fond nous sommes toujours nomade. La sédentarité est pratique, rassurante pour beaucoup, logique pour notre mode de vie. Mais mon corps me disait que nous ne sommes pas fait pour ça. Durant 5 mois, en ayant une hygiène plus que douteuse j’ai connu la meilleure forme de ma vie. J’ai vu mon corps s’adapter à ce mode de vie, perdre beaucoup de poids d’abord, puis créer du muscle. J’étais maintenant plus svelte, plus agile, plus endurant… Je me suis lavé dans les rivières gelées ou sous la pluie, j’ai gardé les mêmes vêtements des jours durant, parfois des semaines, et je ne suis tombé malade qu’une fois, guérissant en quelques jours. Je pouvais désormais marcher 30km sans être fatigué le soir quand, quelques mois plus tôt, 20km étaient déjà une grosse journée. Etre à ce point adapté à la vie dans la nature est grisant et je n’oublierai pas ce sentiment.

Heureusement pour moi mon visa durait encore 6 mois et le voyage ne s’arrêtait pas net. Je trouvais par chance un job dans un endroit fantastique, au mont Cook, qui me réhabituerai avec douceur à une vie plus routinière.

Plus tard, le retour en France était plus dur. J’avais le sentiment étrange d’être triste d’avoir connu un tel bonheur. Peut-être est-ce là la définition exacte de nostalgie. Une seule certitude m’occupait l’esprit à plein temps depuis ce dernier jour du Te Araroa. Je recommencerai. Je ne sais pas dans quelle partie du monde, je ne sais pas quand, mais désormais j’allais employer toute mon énergie à revivre des aventures comme celle là.

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